Nadia et Franck, portrait de passionnés d’art urbain

Dans le cadre de la préparation de la foire, l’équipe de District 13 a souhaité partir à la rencontre de collectionneurs de Street Art. L’objectif est de mieux comprendre leurs parcours, leurs motivations, leurs coups de coeur… C’est Nadia qui se jette à l’eau avec enthousiasme et nous plonge dans sa belle collection.

Comment avez-vous commencé votre collection ?

Je ne me considère pas vraiment comme collectionneuse, mais plutôt comme amatrice d’art passionnée par le Street Art. Avec mon mari Franck, nous nous intéressons au Street Art depuis une dizaine d’années. Cela fait 5 ans que nous avons commencé la collection. Auparavant, nous avions d’autres priorités, notamment d’ordre professionnel. Nous avons commencé avec de petites pièces au format A4, et progressivement, nous nous sommes mis à acheter des pièces beaucoup plus grandes de 2 m sur 1,30 m, sans vraiment se poser la question de savoir où nous allions les mettre… Nous aimons accrocher des oeuvres au mur, mais en laisser certaines au sol afin de pouvoir les déplacer facilement et changer ainsi l’ambiance de notre appartement.

 

Avez-vous baigné dans un univers artistique ? Est-ce une passion récente ou de longue date ?

Nous n’avons pas du tout baigné dans un univers artistique. Nous venons plutôt d’un milieu modeste. J’ai vécu en banlieue parisienne et j’apprécie la culture Street au sens large en terme de musique, de danse et de graffiti. Aller au musée n’est pas toujours une démarche évidente, contrairement à l’art urbain. Voilà pourquoi nous sommes attachés aux choses qui se passent dans la rue, accessibles à tous. Aujourd’hui, la situation devient toutefois paradoxale car les prix des oeuvres Street Art peuvent atteindre des sommets.

Quels sont vos critères de choix ?

Quand on démarre une collection, on est novice. Puis, les goûts évoluent. Il y a des choses qu’on ne comprend pas ou qui ne nous touchent pas, et qu’on finit par aimer. Nous nous intéressons à deux grandes catégories d’artistes. Il y a ceux très graphiques et visuels et ceux plus attachés au message. Quand les artistes allient le côté esthétique et le message, c’est le summum. Je trouve, par exemple, la démarche de Banksy très forte. Franck s’est rendu au Walled Off Hotel, son hôtel à Bethléem. Il a rapporté cette petite box set. Ce qui m’intéresse particulièrement, c’est la démarche qu’il y a derrière : amener son public à se forger une opinion en se rendant sur place.

 

Quel a été votre premier achat et comment repérez-vous les oeuvres ?

Nous avons commencé par l’achat de prints de Shepard Fairey sur le net. C’est le médium le plus accessible. Nous repérons des artistes principalement sur les réseaux sociaux. Nous suivons des galeries, des artistes, les salles de vente et d’autres collectionneurs.
Nos amis nous permettent également de faire des découvertes. Aujourd’hui, nous sommes plus téméraires et misons sur des artistes peu connus. Nous pouvons avoir un coup de cœur sur un artiste complètement inconnu. Nous envisageons moins nos acquisitions comme définitives : nous voulons faire vivre notre collection en cédant certaines oeuvres afin d’en acquérir de nouvelles.

 

Envisagez-vous votre collection comme une passion artistique ou un placement ?

Il s’agit avant tout d’une passion. Les montants peuvent parfois être conséquents, donc nous avons donc forcément un regard sur l’aspect financier. Il ne s’agit pas vraiment de placement, mais nous allons investir dans des oeuvres d’artistes auxquels nous croyons. Nous ne sommes pas en train de spéculer mais d’investir intelligemment. Lorsque nous sommes séduit par le travail réalisé et par la créativité de l’artiste, il nous arrive de craquer. Quand on investit sur de jeunes artistes, le risque est aussi moins grand.
C’est toujours un dilemme de choisir une oeuvre aux dépens d’une autre. Cela génère une certaine frustration mais au final c’est toujours une immense joie !

Quelles sont les oeuvres dont vous êtes les plus fiers ?

Franck a des origines portugaises et nous apprécions particulièrement les artistes portugais Pantónio, dont nous avons une toile dans notre salle à manger ou Vhils dont nous venons d’acheter une oeuvre. De mon côté, je suis d’origine algérienne et j’aime la calligraphie orientale d’El Seed, dont nous avons une oeuvre dans le salon. Ce qui nous unit reste indéniablement la Marianne de Shepard Fairey.

Quels sont vos artistes préférés du moment ?

Il y a un artiste français que nous adorons, c’est Dran. Il n’est pas facile d’accès car il n’est pas représenté par une galerie. Sa dernière exposition s’est déroulée à Londres au mois de juin. Il a fallu aller voir sur Instagram, sur un des dessins il y avait une adresse, sur un autre, une date. C’était un vrai jeu de piste et ça c’était vraiment sympa. Nous avons une de ses oeuvres accrochée dans la chambre des enfants. Mais, le jeu favori de nos filles est de partir à la chasse aux Invaders dans Paris !

 

Que vous apporte le Street Art ?

Avant tout des rencontres… Selon moi, il y a quelque chose d’essentiel, c’est de pouvoir rencontrer les artistes, qu’ils puissent nous expliquer leur travail… Par exemple, lors de la dernière exposition de Maye à la Galerie Itinerrance, nous avons eu l’occasion de rencontrer l’artiste. Il a un univers très poétique et bohème. Nous avions besoin de comprendre pourquoi ses personnages était mi-robots mi-humains. En discutant avec lui, nous avons mieux compris la place centrale occupée par l’environnement dans son œuvre, sa vision du futur, son questionnement sur la façon dont les espèces vont s’adapter pour survivre. Nous avons fait l’acquisition d’une toile très touchante et maternelle, “La Berceuse”. Ne négligeons pas la place des galeristes qui dénichent des talents et peuvent être de précieux alliés, comme l’a été Mehdi Ben Cheikh pour nous.

 

Est-ce que vous aimez d’autres types d’art ou courants artistiques ?

Nous aimons beaucoup la photographie. D’ailleurs, JR en a fait un vrai medium street art… Nous avons eu un coup de coeur pour l’artiste Dan Tague. Suite à l’ouragan Katrina, il a tout perdu. Il a alors commencé à écrire des messages avec les quelques dollars qui lui restaient en poche. Il les photographie et réalise ensuite de grands tirages de 1 m sur 1 m de ses messages sur fond noir. Nous aimons particulièrement le Pop Art mais pouvons également nous extasier devant des oeuvres plus classiques au musée du Louvre.

Avez-vous prévu de venir à la foire District 13 à Drouot en septembre ?

Nous sommes très enthousiastes et impatients de nous rendre à la foire District 13, car nous découvrirons sûrement de nouveaux artistes et de nouvelles galeries. J’étais au départ un peu surprise par le lieu. Mais, c’est une formidable opportunité de promouvoir ce courant en touchant un large public.
Et qui sait, peut être tomberons nous sur une pépite d’OSGEMEOSJR ou Invader

 

Nadia, 40 ans, est en charge d’un cabinet de conseil en informatique, Frank, 38 ans,  est quant à lui Manager dans une banque. Ils vivent au Luxembourg et ont 2 filles, Sofia et Hana. Ils sont passionnés de  Street Art et oeuvrent à se constituer une collection à leur image.