07 Sep De collectionneur à commissaire d’expositions spécialisé dans l’art urbain : le parcours de Nicolas
Dans le cadre de la préparation de la foire, l’équipe de District 13 Art Fair a souhaité partir à la rencontre de collectionneurs de Street Art. L’objectif est de mieux comprendre leurs parcours, leurs motivations, leurs coups de coeur… Nicolas Laugero-Lasserre, directeur de l’ICART (L’école du management de la culture et du marché de l’art) et président-fondateur d’Artistik Rezo, se prête au jeu.
Comment avez-vous commencé votre collection ?
J’ai commencé à m’y intéresser à l’âge de 21 ans en arrivant à Paris. J’en ai 43… J’ai commencé à acheter de façon modeste. Mon premier achat était une oeuvre de l’artiste Jérôme Mesnager “L’équation de l’amour”.
Avez-vous baigné dans un univers artistique ?
Non, j’ai plutôt un parcours d’autodidacte, qui s’est construit au fil des années et des rencontres. Je me suis rapidement rendu compte que j’aimais garder une trace de chaque artiste qui me fascinait. Je voulais conserver une part de leur regard sur le monde et de leur créativité. J’aime bien dépasser l’aspect esthétique. J’ai axé ma collection sur l’aspect militant et le regard des artistes sur le monde. Ce qui me séduit avant toute chose, c’est bien la vocation de l’artiste à donner un éclairage sur la société. Je suis admiratif en particulier de l’approche militante de Banksy.
Quelles sont les oeuvres dont vous êtes le plus fier ?
J’aime particulièrement l’oeuvre composée d’affiches lacérées de Jacques Villeglé, membre fondateur des Nouveaux Réalistes et considéré comme le chef de file des affichistes. Elle est intéressante car elle vient bousculer les codes de l’art et marque l’intrusion de la rue dans les musées. Je trouve le travail de Dran inspirant. “Monsieur Propre” est une oeuvre très forte, pleine d’humour et de cynisme. Le style de Dran est identifiable entre tous. Je pense également à l’oeuvre de Shepard Fairey “Proud parents”, ainsi qu’à JR et son portrait poétique de Robert dans la série “Wrinkles of the City”, qui fait le parallèle entre les rides de cet habitant de Los Angeles et le paysage urbain lui-aussi marqué par le temps.
Quels sont vos projets actuels ?
Nous lançons avec Géraud Boursin et Eric Philippon, Fluctuart, le premier centre d’art urbain flottant au coeur de Paris dans le cadre du projet “Réinventer la Seine”, dont l’objectif est de faire de la Seine un véritable lieu de vie. Fluctuart, situé aux pieds du Pont des Invalides face au Grand Palais, ouvrira au printemps 2019 et sera entièrement consacré à l’art urbain sur 850 m² et trois niveaux. A Bordeaux, je suis commissaire de l’exposition “Légendes Urbaines”, aux côtés de Pierre Lecaroz, qui se déroule dans la Base sous-marine jusqu’au 16 septembre 2018.
Que vous apporte le Street Art ?
C’est avant tout l’occasion de faire de belles rencontres et d’échanger. J’ai pu également développer un projet professionnel autour de cette passion en devenant commissaire d’exposition pour plus de 50 expositions ces dix dernières années, avec des institutions publiques et privées. Depuis 2013, j’ai le grand bonheur de partager ma collection puisqu’elle est exposée de façon permanente à l’école 42, fondée par Xavier Niel. J’ai aussi la chance d’accompagner le parcours d’artistes passionnants comme les Monkey Bird, Madame, Bault, Erell, Romain Froquet ou encore Zdey et Evazesir.
Est-ce que vous aimez d’autres types d’art ou de courants artistiques ?
En ce moment, je m’intéresse à l’Urbex, contraction de Urban Exploration. J’aime les oeuvres du photographe JONK. Son travail se concentre sur les lieux abandonnés dans lesquels la nature a repris ses droits. Ces photos sont d’une grande poésie et l’atmosphère y est très intense. Il vient de publier un livre sur ce thème intitulé “Naturalia”. Je suis très intrigué par le collectif OBVIOUS, qui a récemment créé une série d’oeuvres grâce à l’intelligence artificielle GAN (Generative Adversarial Networks).
Du Street Art à Drouot, qu’est-ce que cela vous évoque pour vous ?
Il est clair que le Street Art est né dans la rue, mais les artistes font un travail en atelier qui leur permet de vivre de leur art. La complémentarité entre le travail en atelier et le travail de rue est essentielle ; le travail en atelier nourrit celui de la rue. Les artistes ne peuvent pas vivre que de la rue. Il me semble donc naturel de les retrouver bientôt pour District 13 Art Fair à Drouot.